Guillaume KASBARIAN : « L’État a créé l’Association QUALITEL pour faire progresser la qualité du logement en France. 50 ans plus tard, nous pouvons nous féliciter du chemin parcouru »

À l’occasion du 50ème anniversaire de l’Association QUALITEL, Guillaume KASBARIAN, Ministre délégué chargé du Logement, nous a accordé un entretien exclusif. Il revient sur les avancées décisives en matière de qualité de l’habitat depuis un demi-siècle, évoque les défis actuels et futurs, ainsi que le rôle fondamental de l’Association QUALITEL. L’occasion également d’exposer les mesures du Gouvernement pour répondre au déficit de logements abordables et accélérer la rénovation énergétique.

crédit photo : ministère de la Transition écologique

Quelles ont été pour vous les avancées les plus significatives en matière de qualité de l’habitat ces 50 dernières années ?

Nous pouvons nous réjouir d’avoir su concrétiser ces dernières décennies, de réelles avancées au service de l’amélioration de la qualité du logement en France.

La qualité des logements s’est ainsi fortement améliorée selon des critères techniques. Nous l’avons fait d’abord pour mieux répondre aux besoins des Français ; nous l’avons également fait pour des raisons énergétiques et environnementales.

Il faut ici souligner le rôle et l’engagement de toute la chaîne de valeur de l’immobilier et de l’acte de construire. Cela a mené à construire différemment de manière plus raisonnée, en faisant preuve d’innovations, en faisant davantage attention aux usages et en s’appuyant sur de nouvelles filières et de nouvelles méthodes. Je pense notamment à l’entrée en vigueur de la RE2020 co-construite avec l’ensemble des acteurs, qui améliore significativement la qualité et la performance des logements neufs.

Enfin, je pense que le Covid a été un véritable catalyseur. La crise sanitaire et les confinements successifs ont conduit les Françaises et les Français, mais aussi l’ensemble des professionnels du secteur, à se réinterroger sur la qualité du logement : la présence d’un espace extérieur, un espace confortable pour travailler chez soi, le confort thermique été comme hiver, la présence d’un espace vert à proximité… l’attention portée à la qualité du logement est plus que jamais devenue centrale pour nos concitoyens comme pour nos politiques publiques.

Quel regard portez-vous sur la qualité du logement aujourd’hui et quelle vision en avez-vous pour le futur ?

Les premiers résultats publiés en décembre 2022 de la dernière enquête logement de l’Insee, datée de 2020, montre une amélioration globale de l’opinion des ménages sur leurs conditions de logement.

La présence de défauts de confort dans les logements diminue. La surface moyenne des logements occupés a légèrement augmenté, principalement du fait de l’accroissement du parc de logements anciens. Par ailleurs, les espaces extérieurs privatifs se généralisent dans les résidences collectives récentes. Il faut continuer dans cette voie et ne pas relâcher nos efforts. Pour l’avenir, nous avons à mon sens trois enjeux.

Premièrement, renforcer notre engagement et notre action pour mieux accompagner et requalifier les copropriétés dégradées. Nous ne pouvons pas accepter que des personnes continuent de vivre aujourd’hui, dans notre pays, dans des conditions d’habitat dégradé, indécent ou indigne. Près de 1,5 million de logements sont situés dans des copropriétés fragiles ou dégradées. La loi que nous avons portée, adoptée à la quasi-unanimité à l’Assemblée nationale et au Sénat et signée le 9 avril dernier par le Président de la République, apporte des solutions concrètes très attendues par les acteurs du terrain et les élus dans nos collectivités.

Deuxièmement, il faut éradiquer les passoires énergétiques. Notre effort est sans précédent. Nous avons augmenté le budget consacré à MaPrimeRenov’, nous renforçons l’éco-PTZ et nous maintenons le calendrier progressif d’interdiction de location des passoires énergétiques.

Troisièmement, nous devons penser la qualité du logement à l’aune des conséquences du changement climatique. Et je pense tout particulièrement à un sujet : le confort d’été. Nous allons vivre des vagues de chaleur de plus en plus intenses et de plus en plus longues. Il faut adapter nos logements au climat de demain, améliorer le confort d’été du parc de logements existants et mieux intégrer le confort d’été lors de la rénovation énergétique des logements. Avec Christophe BECHU, nous formulerons plusieurs mesures dans le cadre du prochain plan national d’adaptation au changement climatique.

Selon vous, quel rôle a joué l’Association QUALITEL et en particulier la certification, en faveur de la qualité de l’habitat ? Qu’attendez-vous de l’Association QUALITEL pour les années à venir ?

Il y a 50 ans, l’Etat a créé l’Association QUALITEL pour faire progresser la qualité du logement en France. 50 ans plus tard, nous pouvons nous féliciter du chemin parcouru et je voudrais saluer l’action et la mobilisation sans faille de QUALITEL au service de la qualité de l’habitat.

Les défis techniques et environnementaux comme les nouveaux usages ne cessent de bousculer et de questionner notre appréciation de la qualité d’un logement, et QUALITEL a su accompagner les porteurs de projets pour répondre aux enjeux et aux aspirations des Français. Au travers de la certification des logements, l’information du grand public, la recherche, la formation des professionnels, l’évaluation et l’expertise, vous offrez à l’ensemble des acteurs l’information et l’accompagnement nécessaires au développement d’un habitat de qualité, confortable et durable.

Vous continuez de développer des outils innovants permettant de répondre aux exigences réglementaires. Je pense tout particulièrement au service CLÉA qui fournit aux propriétaires ou locataires successifs une meilleure connaissance de leur habitat, permettant ainsi de bien l’entretenir, d’améliorer sa qualité et ses performances, et de mieux utiliser ses équipements au quotidien.

Pour l’avenir, j’attends que vous fassiez de l’adaptation du logement au changement climatique une des clés d’analyse principale de la qualité du logement de demain et que la certification NF Habitat puisse accompagner la conception et la production d’une part encore plus importante de logements neufs.

Nous faisons face à un déficit criant de logements abordables. Comment comptez-vous concilier le choc de l’offre que vous appelez de vos vœux et les contraintes budgétaires de l’Etat ?

Je porte un regard lucide sur la situation du logement et la crise bien réelle dans laquelle nous sommes. La feuille de route que m’a confiée le Premier ministre est très claire : ces difficultés doivent nous amener à concentrer nos efforts pour amplifier la production de logements et créer un « choc d’offre ». Le contexte appelle en particulier à prendre des mesures décisives pour accélérer les projets de construction.

Pour amortir cette crise, nous avons annoncé plusieurs mesures visant à soutenir la construction de logements abordables, notamment des logements intermédiaires et des logements sociaux, dans les zones marquées par une forte tension immobilière. Nous accélérons la production de 30 000 logements dans 22 territoires engagés pour le logement ; nous engageons la transformation des zones commerciales pour concevoir de nouveaux quartiers mixtes, avec un objectif de 25 000 logements ; nous avons signé avec les acteurs du logement intermédiaire un pacte pour construire 75 000 logements d’ici 2027.

J’ai l’intention de poursuivre et d’amplifier cette dynamique en présentant dès le mois de mai un projet de loi relatif au développement de l’offre de logements abordables. Celui-ci contiendra des mesures pour mieux intéresser les élus à l’acte de bâtir, mais également un ensemble de mesures visant à renforcer la production du logement social et du logement intermédiaire, qui sont des leviers essentiels pour loger les classes moyennes. Il contiendra enfin des mesures visant à simplifier les procédures de construction et à favoriser les opérations de densification et de surélévation.

Quels sont les moyens mis en place par le Gouvernement pour accélérer la rénovation globale et multicritère du parc de logements en France, condition d’un habitat de qualité et durable ?

La rénovation est indispensable pour lutter contre l’habitat dégradé, respecter nos objectifs de rénovation énergétique et de trajectoire bas carbone, et adapter notre parc de logement au vieillissement de la population et à la dépendance.

Mon action est guidée par deux maîtres mots : simplicité et confiance. Depuis mon arrivée, j’ai engagé des mesures de simplification du dispositif MaPrimeRénov’ afin d’assouplir le financement des rénovations simples, sans perdre le cap de la rénovation globale.

Avant l’été, je vais proposer un Pacte de confiance de la rénovation énergétique à l’ensemble des acteurs de la filière pour embarquer tout le monde et restaurer la confiance de l’ensemble des parties prenantes. C’est à cette condition que les ménages pourront s’engager sereinement dans des projets de travaux.

Ce qu’il nous faut maintenant, c’est convaincre. Convaincre les Français d’y aller et de s’engager dans ces travaux. C’est tout l’objet de la « Tournée France Rénov’ » que j’ai lancée avec l’Anah le 19 avril dernier à Chartres. Elle permettra de mieux mettre en valeur les espaces France Rénov’, qui permettent de venir à la rencontre de conseillers France Rénov’, de prendre rendez-vous pour discuter de son projet et de bénéficier d’un premier accompagnement personnalisé.

Tous ensemble, nous pouvons et nous devons aller plus vite pour engager des rénovations performantes : c’est bon pour le portefeuille des Français qui feront des économies sur leur facture énergétique, c’est bon pour la planète et c’est bon pour notre économie.

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