La mesure phare du programme en faveur du logement
QUALITEL : Le logement n’est pas seulement le premier poste de dépense des ménages des Français, il est aussi un des marqueurs des inégalités et la crise sanitaire en a été un bon révélateur. Pourtant, il n’est pas très présent dans cette campagne présidentielle (mais également dans les précédentes). Quelle est la mesure phare de votre programme en faveur du logement ?
Valérie Pécresse : J’assume d’être la candidate qui portera des mesures fortes pour permettre au plus grand nombre de Français d’accéder à la propriété.
Contrairement à Emmanuel Macron, je ne vois pas dans la propriété une rente qu’il faille décourager. Mon objectif est qu’à terme tous les Français qui travaillent puissent accéder à la propriété, sans qu’ils aient à se reposer sur un héritage. Et pour qu’ils aient à leur tour un bien, le fruit de leur travail, à transmettre à la génération d’après. Cette question de la transmission est au cœur de mon projet pour les Français.
Cet accompagnement vers la propriété est le levier qui enclenchera une vraie relance de la construction, en mettant sur le marché chaque année plus de 500 000 nouveaux logements, neufs ou jusque-là inhabitables qui seront rénovés.
Pour créer ce choc de l’accession, nous allons généraliser sur tout le territoire et renforcer le Prêt à Taux Zéro qui devait s’éteindre. Je veux libérer un milliard de Prêts à Taux Zéro de plus par an. Nous allons également revenir sur l’arrêt de l’APL accession intervenu depuis 2018 et qui aidait pourtant 35 000 nouveaux ménages à devenir propriétaires chaque année. Tout comme nous allons mettre en place un fonds de garantie sur les mensualités dues aux banques. Cette mesure sera une sorte de caution solidaire qui ciblera les jeunes actifs en CDD, les entrepreneurs et les indépendants, tous ceux à qui les banques ont aujourd’hui du mal à octroyer des prêts.
La rénovation énergétique
QUALITEL : La rénovation énergétique des logements est un prérequis essentiel à l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050 mais également au maintien du pouvoir d’achat de nombreux Français. En parallèle, plus de 80 % des logements de 2050 sont d’ores et déjà construits. Quels leviers seront mis en place pour soutenir une rénovation appropriée des logements ?
Valérie Pécresse : Depuis la loi Climat et résilience de l’été dernier, les logements ayant une étiquette énergétique F et G vont progressivement sortir du marché de la location à partir de 2025. On parle de 4,8 millions de logements dont 2 millions sont en location. Je ne peux pas me résoudre à accepter de sortir autant de logements du marché de la location alors qu’on a un tel besoin de logements ! Je reviendrai donc sur cette mesure de la loi Climat et résilience en introduisant un principe de malus sur les locations de passoires thermiques.
Je veux que l’effort de rénovation porte prioritairement sur la lutte contre les passoires thermiques, et plus particulièrement sur les près de 2 millions de logements occupés par des propriétaires à faibles revenus.
Nous voulons mener une politique pragmatique et réaliste au plan budgétaire. C’est pourquoi nous ciblerons prioritairement :
- pour les pavillons, le traitement des fenêtres et des toitures pour en améliorer l’isolation ;
- pour l’habitat collectif, le traitement des fenêtres et du chauffage pour remplacer les vieux chauffages électriques et les chaudières à gaz ou au fioul par des systèmes plus modernes y compris électriques, donc reposant sur l’énergie nucléaire qui garantit aujourd’hui l’énergie la moins chère.
S’agissant des fenêtres, nous voulons en finir avec le simple vitrage en favorisant un plan « fenêtres françaises » car nous disposons des entreprises et des savoir-faire pour opérer ces transformations.
Avec nos solutions, on gagne 50 % d’efficacité énergétique à un prix raisonnable de l’ordre de 10 000 € par logement, sans avoir besoin d’aller jusqu’à des solutions très coûteuses et difficiles à assumer par les ménages quand une réhabilitation complète coûte de l’ordre de 40 000 €.
Nous proposons que l’Etat prenne en charge la moitié du coût de ces travaux via un crédit d’impôts. Donc, en mobilisant 1 à 2 Mds € par an, nous pourrons en 5 ans aider 2 millions de logements à ne plus être des passoires thermiques.
Porter cette politique supposera aussi de revoir et de simplifier l’usine à gaz qu’est MaPrimeRenov’, qui est devenue tellement compliquée que le gouvernement a dû créer en janvier une agence dédiée pour l’expliquer… Le système des certificats d’économie d’énergie (CEE) devra aussi être simplifié.
Je pense plus généralement que la politique de rénovation énergétique gagnerait en efficacité en étant, là encore, rapprochée du terrain. Je souhaite donc que les politiques correspondantes, comme les agences qui les portent, l’ANAH et l’ADEME, soient régionalisées. Cette régionalisation permettra aussi de faire le lien avec les filières professionnelles et la formation.
L’enjeu n’est pas uniquement de rénover thermiquement les logements (isolation, changements de fenêtres), mais aussi de changer d’énergie pour se passer des fossiles (fioul, gaz, charbon…).
L'offre de logements face aux aspirations des Français
QUALITEL : Le constat est unanime sur le déficit fort de logements dans certains territoires ou sur l’inadéquation entre la nature de l’offre et les aspirations des Français. En tant que Présidente, quelles mesures prendrez-vous pour résoudre cette problématique ?
Valérie Pécresse : Depuis les périodes successives de confinement, nous avons fait le constat que nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à vouloir quitter les villes très denses pour leur préférer des villes à taille humaine, plus proches de la nature.
Je veux accompagner ce mouvement qui participera de la revitalisation de nos villes petites et moyennes. Nous allons non seulement réhabiliter le parc de logements existants, parfois fort dégradé en centre-bourg, en fléchant mieux les aides à la rénovation sur ces biens et en mobilisant également les bailleurs sociaux. Nous mobiliserons aussi les friches ainsi que le foncier des zones d’activités économiques ou commerciales de périphérie pour les transformer en vrais quartiers de ville.
Et, en fonction des besoins, nous allègerons la contrainte posée par le zéro artificialisation nette notamment dans le rural sur les communes qui n’ont pas la capacité suffisante en renouvellement urbain pour accueillir de nouvelles populations. Ma méthode consiste à faire confiance aux maires qui ont, non seulement une connaissance fine de leur territoire mais aussi la conscience des grands enjeux qui se jouent à l’échelle nationale. Je pense qu’ils sont les plus à même de définir les formes urbaines les mieux adaptées aux besoins de leur population actuelle et future.
La qualité des logements en France
QUALITEL : On parle moins de la qualité des logements eux-mêmes, pourtant remise en exergue par la crise sanitaire qui a révélé des inégalités et de nouveaux besoins en termes de confort thermique, acoustique, qualité de l’air, superficie, agencement, luminosité… Concrètement, quelles mesures comptez-vous mettre en place pour permettre à chaque Français de vivre dans un logement répondant aux critères fondamentaux de qualité d’usage évoqués ci-dessus et en phase avec leurs attentes ?
Valérie Pécresse : Je veux passer un pacte avec les professionnels de l’immobilier. Ma méthode consistera à créer les conditions pour construire plus, mais aussi plus vite et plus facilement. Pour répondre à la colère de nos entreprises du bâtiment qui ont vu les normes s’alourdir encore plus sous le quinquennat d’Emmanuel Macron, je m’engagerai à simplifier et à« débureaucratiser » le champ de l’urbanisme, ainsi qu’à accélérer le traitement des recours sur les autorisations d’urbanisme (délais raccourcis à 6 mois pour les recours en matière d’urbanisme).
En contrepartie de ma politique de relance de la construction, j’attends des professionnels de l’immobilier qu’ils construisent mieux. Je sais en effet que, lorsque les conditions économiques sont remplies, ils sont en capacité d’offrir à nos concitoyens des logements spacieux, avec la pièce en plus pour le télétravail, répondant à des ambitions environnementales fortes et bien isolés. Car une bonne performance énergétique, c’est bon pour la planète et bon pour le porte-monnaie. Et, bien sûr, ces réalisations nouvelles devront faire la part belle aux espaces ouverts sur l’extérieur qui ont manqué à tant de nos concitoyens pendant les périodes de confinement.
Grâce à ces mesures, nous allons créer les conditions adéquates pour que nos professionnels de l’immobilier puissent pleinement exprimer leur goût pour l’excellence et leur capacité à innover au service d’un meilleur logement pour tous nos concitoyens.
Pour garantir la neutralité de sa démarche, l’Association QUALITEL a sollicité et relancé tous les candidats selon la même procédure : questionnaire identique et même nombre de signes maximum. QUALITEL s’engage à publier l’ensemble des réponses reçues d’ici le 8 avril.