Laure-Anne Geoffroy Duprez, Présidente de l’UNSFA : « Nous nous devons de proposer un logement abordable, décent, de qualité et durable pour tous »

Laure-Anne Geoffroy Duprez est la Présidente de l’UNSFA, l’Union des Architectes, première organisation représentative des architectes en France qui rassemble de nombreux syndicats locaux répartis sur l’ensemble du territoire. Au cœur des enjeux de construction et de réhabilitation, elle donne sa vision du logement de demain, et décrypte pour QUALITEL, à l’occasion des 50 ans de l’Association, les nouvelles attentes en matière de qualité de l’habitat.

Quelles ont été pour vous les avancées les plus significatives en matière de qualité de l’habitat ces 50 dernières années ?

Les avancées en matière de qualité de l’habitat sont souvent corrélées à des évènements liés à l’histoire. Véritables catalyseurs des évolutions significatives : la reconstruction d’après-guerre, l’hygiénisme (« de l’eau, de l’air, de la lumière »), les conséquences de la fin de la guerre d’Algérie, les crises pétrolières et la nécessaire préoccupation d’économiser l’énergie, les crises économiques (1993, 2008…), la pandémie (dévoilant la nécessité absolue de bénéficier de lumière, d’espaces pour le télétravail, d’espaces extérieurs généreux), le réchauffement climatique et la préservation des ressources, le développement du numérique et de l’Intelligence artificielle, pour mieux concevoir et gérer le logement. Aujourd’hui, on parle d’habitat sous toutes ses formes (un lieu pour la vie de famille, dormir, et de plus en plus pour travailler).

De nouveaux termes apparaissent pour le définir : inclusif, adaptable, réutilisable, bien-être, mixité d’usages et de fonctions, cohabitation, co-living, etc.

L’architecte, premier intervenant dans l’acte de concevoir un logement de qualité, a su s’adapter en permanence aux changements de notre société et aux aspirations des citoyens qui en découlent.

Quel regard portez-vous sur la qualité du logement aujourd’hui et quelle vision en avez-vous pour le futur ?

Par nature, nous sommes à l’écoute des besoins exprimés par les usagers et nous percevons, sur le terrain, leurs évolutions.

A ce titre, les épisodes de confinement ont révélé de nombreux besoins : des espaces plus grands, une proximité accrue avec l’extérieur et le vivant, davantage de lumière naturelle, davantage de hauteur, davantage d’adaptabilité, etc.

Ces besoins appellent des modifications, conceptuelles, culturelles, normatives et financières, dans notre manière d’appréhender l’habitat.

L’accent doit-être mis sur le bien-être des occupants. L’habitat, en construction neuve ou en rénovation, n’est pas seulement une construction technique et fonctionnelle. Réduire le stress, favoriser la créativité, permettre le repos et rendre possible les changements de vie (souhaités ou subis) sont autant de nouvelles missions que l’habitat doit remplir aujourd’hui.

La notion de qualité, qui ne peut pas être une simple addition de critères à « valider », doit embrasser toutes les composantes de l’habitat et intégrer l’architecture, avec un grand A, dans sa définition : ambiance, ressenti, spatialité, fluidité, adaptabilité, etc.

Selon vous, quel rôle a joué l’Association QUALITEL et la certification en faveur de la qualité de l’habitat ? Comment amplifier ses actions tant auprès des professionnels que des particuliers ?

L’UNSFA est un partenaire historique de l’Association QUALITEL. Notre syndicat est fier d’avoir activement participé aux grandes évolutions de la certification (Qualitel, Habitat & Environnement, NF Logement, NF Habitat, etc.). Toujours dans un souci de simplification, de compréhension et d’acceptabilité de la démarche. La performance et sa pérennité, ce n’est pas un simple « audit papier », mais accepter la mesure, à travers la certification, qui va garantir dans le temps la pérennité de cette même performance. La qualité de logement, c’est d’abord l’Architecte qui la conçoit. L’Association est un partenaire à l’écoute des préoccupations de ses membres et des usagers.

Je crois beaucoup aux évolutions numériques au sein de QUALITEL, à travers l’intelligence artificielle. C’est notre défi pour les années à venir, au service du bâtiment et du bien construire.

Vous venez d’être élue à la Présidence de l’UNSFA. Quelle appréciation avez-vous de la situation actuelle, et quelles ambitions portez-vous pour la profession d’architecte ?

La situation actuelle, qui mêle incertitudes politiques, baisse des commandes et pénurie de logements pour nos concitoyens, est alarmante.

Pour autant, nous sommes dans une démarche constructive et positive ; comme évoqué précédemment, les crises sont le terreau fertile de l’innovation : transformons cette période en levier d’améliorations pour notre habitat et notre cadre de vie. Cet optimisme de terrain porte les valeurs qui sont les nôtres : nous nous devons collectivement de pouvoir proposer un logement abordable, décent, de qualité et durable pour tous.

Dans ce contexte de crise économique et sociale, les architectes se doivent de porter une vision prospective de ce que signifie « habiter ». Ils se doivent de porter une vision durable du logement qui aujourd’hui intègre aussi bien la réutilisation et la rénovation de l’existant que la nécessité de produire de manière raisonnée et durable là où le neuf est nécessaire afin de ne pas laisser le besoin de rapidité et d’efficacité lié à une crise, effacer la nécessité de penser des logements de qualité, adaptés à chaque territoire et soucieux de répondre aux enjeux écologiques de la filière.

Notre profession, tout en se réinventant et en diversifiant ses domaines de compétences, doit continuer à tenir un rôle structurant dans la conception et la construction. Tout en conservant ses fondamentaux, notre profession évolue, s’étoffe et acquiert de nouvelles compétences au service de l’intérêt public.

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